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Ivresse : cinquante nuances de «gris»

Durant les fêtes, en moyenne, 66% d’entre nous boivent de l’alcool, et finissent, pour beaucoup, un peu pompettes, gris, ivres, voire complètement saouls… Quitte à l’être de nouveau cette année, autant le bredouiller avec originalité : voici cinquante (et quelques) façons de dire son ivresse !

« Les Tontons flingueurs » ont « sorti le vitriol » (Georges Lautner, 1963)

1 – Les classiques

  • Prendre un acompte : s’enivrer prématurément.
  • Prendre une avoinée : s’enivrer.
  • Être bourré comme un coing : être complètement ivre (variantes : comme une cantine, comme une danse auvergnate, comme un pétard).
  • Se cramer le burlingue : boire de l’alcool fort en grande quantité.
  • Être chaud comme un marron : être ivre.
  • Se noircir comme un corbeau : s’enivrer.
  • Tenir une cuite grand format : être complètement ivre.
  • Être déchiré comme un cow-boy : être complètement ivre (variante : comme un drapeau).
  • Se remplir le gazomètre : boire jusqu’à plus soif.
  • Être givré comme un sapin de Noël : être complètement ivre.
  • S’arsouiller la glotte : s’enivrer.
  • Se klaxonner la gueule : s’enivrer.
  • Être murgé comme un goret : être complètement ivre.
  • Se taper un pieu de course : boire une bouteille (de vin) de qualité.
  • S’humecter le pipe-line : boire.
  • Se graisser le toboggan : boire copieusement.
  • Se goudronner le vestibule : s’enivrer copieusement.

2 – Les imagées

  • Pinter comme un archange : être un franc buveur.
  • Avoir des godasses à bascule : être ivre et tituber.
  • Être beau comme un soleil : être ivre.
  • Être beurré comme une biscotte : être complètement ivre (variantes : comme une huître, comme un Petit Lu, comme un plat de moules au gratin, comme une quiche, comme une tartine).
  • Se lézarder la casemate : s’enivrer.
  • Avoir le casque à pointe : avoir très mal à la tête à la suite d’excès d’alcool.
  • Avoir la cervelle en terrine : avoir le cerveau embrumé par l’ivresse.
  • Avoir les coquards qui font du trois mille tours : ne plus avoir les yeux en face des trous sous l’effet de l’ivresse.
  • Être défoncé comme un terrain de manœuvre : être complètement ivre.
  • Être démâté comme un cap-hornier : être ivre jusqu’à s’affaler.
  • Prendre son lit en marche : être en état d’ivresse, en rentrant chez soi.
  • Rentrer à deux : regagner son domicile en état d’ivresse.
  • Avoir des lunettes en peau de saucisson : voir trouble sous l’effet de l’ivresse.
  • Se napalmer la grotte : boire de l’alcool fort à tire-larigot.
  • Se noircir comme une pelle à feu : s’enivrer.
  • Avoir les talons au milieu des semelles : être ivre et tituber.

3 – Les régionales

  • S’en mettre dans le biniou : boire outre mesure.
  • Avoir les bisons qui courent sous le scalp : avoir mal à la tête à la suite d’excès d’alcool.
  • S’aniser la chetron : se saouler au pastis.
  • Marcher sur son kilt : avoir ingurgité trop de whisky.
  • Être pété comme un Polack : être complètement ivre.
  • Picoler en Suisse : boire seul.
  • S’irriguer la terre de feu : boire.
  • S’enfiler un sens interdit : boire un ballon de beaujolais.

4 – Les « what the fuck » (WTF)

  • Prendre une banane : s’enivrer.
  • Être blindé jusqu’à la quinzième capucine : être complètement ivre (variante : être blindé comme un destroyer).
  • Être bourré à double chevrotine : être complètement ivre.
  • Prendre une brosse : s’enivrer.
  • Être chicore comme une vache : être complètement ivre.
  • Avoir la gueule en chocolat : être ivre.
  • Aller à la corvée de cirage : s’enivrer en groupe.
  • Se pistacher la cravate : s’enivrer.
  • Avoir la crête rouge : être ivre.
  • Se pacter la fraise : s’enivrer.
  • Lécher de la groseille de zouave : boire de l’absinthe.
  • Prendre une jupette : s’enivrer.
  • Se cuire les narines : s’enivrer.
  • Avoir chaud aux plumes : être ivre.
  • Voir les rats bleus : être atteint de delirium tremens.
  • Marcher au thé : être alcoolique.

5 – Et vu/bu d’ailleurs ?

Aux États-Unis, résume le journaliste Aaron Ayscough, quand on est ivre, on est tipsy (éméché), wasted (littéralement gâché ou gaspillé, mais entendu ici comme ravagé ou dévasté), hammered (martelé), plastered (plâtré), soused (imbibé), shitfaced (littéralement avoir une gueule de merde) ou encore blitzed (éclaté, anéanti façon Blitzkrieg – guerre éclair) ; ou bien on a three sheets to the wind (une vieille expression de marin, signifiant en bref qu’on perd le contrôle de son navire).

En Italie, comme le détaille ci-dessous le chef et auteur Tommaso Melilli, c’est un peu plus imagé :

  • Sono alticcio (je suis un peu haut).
  • Sono brillo (je suis brillant).
  • Mi è presa la scimmia (littéralement : j’ai été pris par le singe).
  • Sono ubriaco duro come uno scalino (je suis ivre dur comme une marche d’escalier).
  • Sono gonfio come una zampogna (je suis gonflé comme une cornemuse).
  • Sono ubriaco come una cucuzza (je suis ivre comme une courgette – référence très fine au fait que la courgette est quasi entièrement composée d’eau).
  • Sono ubriaco come San Lazzaro (je suis ivre comme Saint-Lazare ; quand il sortait de la tombe je suppose).

Tu t’es vu quand t’as bu ?

Hormis ces dernières venues d’ailleurs, toutes ces expressions argotiques autour de la boisson, et de très nombreuses autres, mises en contexte dans des citations d’Audiard, Brassens, Gainsbourg ou San-Antonio, sont tirées du truculent livre de Jean-Marc Richard paru en 2007 aux éditions de Paris : L’Argot des francs buveurs.

En bonus, voici la drunken people compilation : cinq minutes de gars qui ont été salement pris par le singe…

https://www.youtube.com/watch?v=PM9wx3slsOA

Cet article, augmenté en 2020, est paru initialement en 2012 sur Rue89.

Par Antonin Iommi-Amunategui

Rédacteur en chef